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Pourquoi embarquons-nous toujours dans les avions par la gauche ?

Nous montons toujours dans les avions du côté gauche parce que l’industrie aéronautique est tombée dans le piège dans lequel les entreprises digitales risquent également de se fourvoyer : oublier que le passé est comme une ombre dont on ne peut se défaire.

 

Qui n’a pas brillé dans un déjeuner d’affaires en expliquant aux autres  convives pourquoi nous faisons se toucher nos verres lorsque nous trinquons ? Qui surprendra demain les autres personnes attablées avec cette fois-ci une question et une réponse encore jamais entendues ? Et bien vous, puisque vous venez de commencer à lire cet article.

N’essayez pas de monter dans un avion du côté droit

Avez-vous remarqué, vous montez toujours dans un avion du côté gauche. Mais pourquoi ?

La réponse est simple et nécessite un petit détour par l’histoire. Lorsque l’aviation apparaît, l’armée voit immédiatement le potentiel militaire de ces nouveaux engins. L’armée de l’air n’existe pas encore. L’Etat-major confie donc à la cavalerie le soin de s’intéresser aux avions. Or les cavaliers portent un sabre sur leur gauche, puisqu’ils sont droitiers. Ceci les oblige à  monter sur leurs chevaux par la gauche (le contraire étant quasi-impossible à cause du sabre). Habitués à enfourcher leurs montures par la gauche, ils entreront tout naturellement dans les avions par la gauche. La suite est logique. Les constructeurs d’avions civiles finiront par eux aussi fabriquer des avions avec des portes sur le flan gauche des carlingues, décollant et atterrissant dans des aéroports prévus eux-mêmes pour que les embarcations se fassent par la gauche. La boucle est bouclée.

 

Une leçon pour le digital

L’avenir fait rêver. La quête incessante d’innovations encourage à regarder vers le futur et à parfois oublier de délester les produits d’archaïsmes hérités du passé et qui les ankylosent.  A titre d’exemple, les claviers AZERTY que nous utilisons sont une hérésie ergonomique et leur seul raison d’être repose sur le poids du passé. Cf : notre article intitulé Quand les technologies font du moonwalk.

Un point qui n’échappa pas à Google, qui sut voir dans l’algorithme de Yahoo! -le moteur de recherche dominant d’alors et que l’on croyait indétrônable- une approche finalement désuète du classement des pages web. L’apport de Page Rank étant d’indexer les pages selon des critères de popularité plutôt que de nombres d’occurrences des mots recherchés dans celles-ci.

Tel un constructeur d’avion, Yahoo! s’était contenté de moderniser, améliorer et enrichir une méthode somme toute ancienne (à l’échelle de temps du digital du moins). Google a permis d’embarquer à bord du digital par la droite tout en assurant ainsi son propre décollage.

 

Vers une archéologie de l’innovation

Dans un monde de plus en plus rempli d’objets se faisant chaque jour davantage les incubateurs d’innovations multiples (un smartphone, à lui seul, héberge des innovations dans les domaines de la téléphonie, de la photo, de la vidéo, de l’intelligence artificielle, du logiciel, de la reconnaissance vocale…), il importe de partir à la découverte des reliquats du passé, enfouis au plus profond des produits les plus modernes.

Deux pistes méritent d’ores et déjà d’être explorées :

  • Les batteries qui, à l’ère des technologies exponentielles, du big data et du tout numérique, pourraient devenir les goulots d’étranglement du monde digital.
  • Le caractère hyper polluant de l’industrie numérique qu’il faudra bien admettre un jour ou l’autre, afin d’apporter des solutions (cf. notre article intitulé : De quelle couleur est le digital ? Et si c’était le vert.)

 

 

Après le reverse engineering, puis le reverse mentoring, place à la reverse innovation, à ne plus prendre dans son acception actuelle selon laquelle elle consiste à lancer de nouveaux produits dans des pays émergents avant de les commercialiser dans les pays développés. La notion revêt ici un sens supplémentaire et nous en proposons en guise de conclusion la définition : la reverse innovation est une discipline consistant à décomposer un produit existant, généralement à forte composante technologique, afin d’y déloger des résidus du passé de nature à pénaliser ses évolutions futures.