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Pourquoi les patrons qui aiment le foot réussiront mieux la transformation digitale de leurs entreprises

En ne s’intéressant qu’aux GAFA, les PDG français commettent la même erreur que les supporters de foot lorsqu’ils ne regardent que les salaires des meilleurs joueurs. La transformation numérique de nos entreprises interviendra lorsque nous regarderont l’économie numérique dans son ensemble.

Quel point commun entre Neymar et Marc Zuckerberg ? Entre le Barca et le campus de Google ? Entre la Silicon Valley et la Station F ? Entre un supporter du PSG et un PDG ? Un seul et non des moindres. Ils appartiennent tous à l’une ou l’autre de ces deux économies, largement comparables, en bien des points : l’économie du football et l’économie numérique.

Inutile de rappeler le montant des salaires des joueurs de foot les mieux payés tant ils ont déjà scandalisé de monde. Additionnés, ils représenteraient un montant qui ferait pâlir même un Carlos Ghosn.

Pourtant, la somme des salaires des joueurs les mieux payés du monde ne représente qu’une infime fraction (moins de 0,5% pour être précis) de la totalité de l’économie du football, estimée à 400 milliards d’euros (dont 5 seulement pour la France). Par économie du football, nous entendons celle qui se compose des recettes aux guichets, des droits de retransmission (à la radio et à la télévision), de la publicité, des produits dérivés, des abonnements des supporters à leurs clubs… sans compter l’impact sur d’autres secteurs de l’économie : BTP pour la construction des stades, assurance, services (sécurité, organisation d’événements, sponsoring, paris sportifs…), transport en cars des supporters, restauration (bières comprises naturellement), etc.

 

Ce que les acteurs de la filière ont compris, contrairement au PDG confrontés à la nécessité de la transformation digitale de leur entreprise, c’est que dans le sport on peut gagner beaucoup d’argent sans être Neymar, Edison Cavani ou Kylian MBappé, tout comme le digital peut s’avérer profitable, sans être Google, Apple, Facebook ou Amazon.

Tel un site e-commerce qui comporte une partie visible, appelée front-office dans le jargon, l’économie numérique a elle aussi sa partie émergée de l’iceberg. Et comme un site e-commerce, beaucoup de choses, la plupart même, se passent côté back-office, à l’arrière du décor, dans la partie immergée de l’iceberg. Certes les GAFA, les NATU et autres
BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi) ont des capitalisations boursières records, mais leur chiffre d’affaires mis bout à bout ne représentent sans doute pas l’essentiel de l’économie numérique prise dans sa totalité.

Alors, pourquoi aborder la transformation digitale d’une entreprise en se bornant à regarder uniquement ce qui se voit, tel un supporter qui s’écrie : « Quel nul ce Neymar ! Moi, à ce salaire-là, je te le marque, le but ! » Certes, un travers humain bien connu consiste à croire que le changement le plus récent est aussi et forcément le plus important, le plus impactant. C’est faux, les innovations prochaines des champions du digital n’auront peut-être pas autant d’influence dans les dix prochaines années que les progrès qui s’effectuent au sein d’entreprises, dont nous ne connaissons pas encore le nom, enfouies dans la partie immergée du numérique, quelque part entre le cloud, le big data et l’intelligence artificielle…

 

Assez parlé. Il est temps de sortir des vestiaires pour regagner la pelouse. Mais au fait, quel PDG sera l’homme du match? Attendons la prochaine saison pour le savoir. Mais surtout, espérons ne pas avoir à dire : « Quel nul ce PDG ! Moi, à ce salaire-là, je ne le rate pas le virage digital ! »


Article initialement paru sur le Journal du Net